3. Soins de santé numériques
En conséquence à la croissance et au viellissement de la population de l’Ontario, la demande de services de santé augmentera partout dans les prochaines années, y compris chez les francophones. Étant donné que les coûts des soins de santé augmentent plus rapidement que ceux de tous les autres secteurs mis ensemble, le gouvernement doit mettre en œuvre des services rentables. Dans un tel scénario, les services de santé numériques peuvent avoir un effet notable en améliorant l’accès au moyen de services de santé en ligne tout en réduisant la dépendance à l’égard des services en personne coûteux et des visites à l’hôpital. Mais cela pose un dilemme lorsque le besoin fondamental des francophones d’être servis en personne est plus vital que jamais. Compte tenu du vieillissement de la population, la préférence des personnes âgées francophones d’avoir une consultation en personne plutôt que de manière virtuelle devient évidente.
Le Réseau Télémédecine Ontario (RTO) offre des services de santé virtuels en établissant à distance des liens entre les fournisseurs et les patients. Cette initiative est particulièrement importante pour atteindre les collectivités éloignées et rurales de la province, surtout dans les situations d’urgence126. La province offre aussi la ligne « Télésanté Ontario », qui fournit gratuitement des conseils d’infirmières autorisées en matière de santé127. Ce système fonctionne déjà dans les deux langues et semble fort bien servir les patients et clients francophones. Au fur et à mesure que les services numériques continuent à évoluer, il serait essentiel d’élaborer des mécanismes novateurs visant à améliorer et à personnaliser davantage ces services selon les besoins des francophones, afin qu’ils puissent constituer des solutions durables dans les soins de santé.
Un exemple d’une telle personnalisation à l’échelle régionale est la prestation de services de télépsychiatrie aux francophones au sein du RLISS du Sud-Ouest, dans le cadre du RTO128. Ces services sont particulièrement importants, car les patients ayant des problèmes de santé mentale et de toxicomanie doivent souvent attendre longtemps avant de pouvoir obtenir des rendez- vous en personne avec des spécialistes; les services de télépsychiatrie améliorent l’accès en temps opportun aux soins sans que les personnes n’aient à se déplacer129.
Dans la même veine, en 2011, Trellis Mental Health and Developmental Services, le RLISS de Waterloo Wellington et d’autres partenaires de services de santé ont collaboré au lancement d’un service de télémédecine en matière de santé mentale offert dans la région en français, dans le cadre du RTO130. À Ottawa, l’Hôpital Montfort a également commencé à fournir des services d’experts médicaux à distance à des collectivités francophones du nord et de l’est de l’Ontario.
Les données provenant de l’utilisation de ces services devraient aussi servir à analyser des collectivités individuelles, particulièrement celles dans les régions éloignées, ou divers groupes linguistiques, afin de cerner leurs problèmes uniques et d’élaborer des solutions ciblées, ainsi que pour surveiller et évaluer le bien-être et la vitalité des collectivités minoritaires. Par exemple, l’outil d’évaluation de l’impact sur l’équité en matière de santé du ministère de la Santé et des Soins de longue durée peut être numérisé pour comparer les résultats des collectivités francophones et mieux planifier les politiques et les programmes à l’intention des Franco-Ontariens131.
L’élaboration d’une stratégie complète en matière de ressources humaines pour les professionnels de la santé francophones dans la province est une autre question cruciale qui peut être abordée sous l’angle numérique. Entre autres, cette stratégie comprendrait une meilleure mise en correspondance et un meilleur jumelage entre les professionnels francophones et les citoyens. Le Réseau Santé Nouvelle-Écosse a créé un tel répertoire pour améliorer l’accès aux services de santé primaires en français pour les francophones de la Nouvelle-Écosse. Ce répertoire de professionnels de la santé francophones a été créé en collaboration avec le Department of Health and Wellness de la Nouvelle-Écosse. Le public peut utiliser ce répertoire pour trouver des renseignements sur les services en français, tandis que les professionnels de la santé francophones peuvent demander que leurs noms soient ajoutés au répertoire132. Une initiative semblable en Ontario serait primordiale pour améliorer l’accès aux services en français.
Le ministère de la Santé et des Soins de longue durée a établi la Base de données des professions de la santé (BDPS). Cette base de données collecte annuellement des informations démographiques, géographiques, sur l’éducation et sur l’emploi au sujet de tous les professionnels de la santé réglementés (sauf les médecins) en Ontario. La BDPS collecte aussi de l’information au sujet des capacités des professionnels de la santé de fournir des services en français. La base offre l’opportunité aux agences de soins de santé de planifier l’offre de services en français en utilisant des données au sujet de la main d’oeuvre en santé.
Au moment de la rédaction, les données les plus récentes dans la BDPS dataient de 2016 ; toutefois, les données remontent à 2008. Le ministère collecte les données de 2017 en ce moment. Le public peut toutefois demander l’accès aux données de la BDPS à tout moment afin de planifier les ressources humaines en santé.
De plus, la récente mise en œuvre d’OZI (la base de données développée par le Réseau des services de santé en français de l’est de Ontario) dans l’ensemble de la province jouera un rôle pivot dans la schématisation des services de santé en français disponibles, ainsi que dans la planification et la coordination de l’accès à ces services et aux professionnels à l’échelon régional. Grâce à l’appui des entités de planification des services de santé en français, des réseaux locaux d’intégration des services de santé et du ministère de la Santé et des Soins de longue durée, il s’agit là d’une des initiatives les plus prometteuses au titre de l’amélioration de l’accès aux services de santé en français.
Il est aussi essentiel d’utiliser la technologie numérique pour tirer le meilleur parti de l’expertise disponible, en créant un réseau d’organismes actifs dans la province qui travaillent vers des buts similaires afin de créer ensemble une stratégie exhaustive en matière de ressources humaines pour les services de santé en français. Certains organismes ont déjà travaillé sur de telles initiatives. Par exemple, la Société Santé en français et le Réseau franco-santé du Sud de l’Ontario ont établi la Stratégie en matière de ressources humaines en santé. Il s’agit d’une ressource en ligne qui aide les organismes de santé à améliorer l’accès aux services en français en développant une expertise sur le plan des ressources humaines bilingues et en fournissant des conseils sur des questions telles que le recrutement et le maintien en fonction du personnel bilingue133. La Société Santé en français a aussi créé un réseau en vue de faciliter le partage des meilleures pratiques en matière de soins de santé en français134.
De manière générale, la Lentille francophone, que l’Office des affaires francophones a mise en place, s’applique également dans ce contexte aux services numériques de santé et du gouvernement. Elle peut offrir de précieux conseils aux autres ministères pour qu’ils puissent intégrer efficacement les services en français à toutes les étapes de la planification des politiques et programmes135.
RECOMMANDATION 11
Le commissaire recommande à la ministre déléguée aux Affaires francophones de prévoir, avec l’aide de ses collègues du Cabinet, une stratégie complète qui tient compte des différences culturelles et linguistiques des collectivités francophones à l’égard du déploiement de systèmes numériques, et des possibilités de meilleurs services adaptés et modulés en fonction des besoins des communautés francophones de toute la province. La stratégie devra porter sur les secteurs clés de la santé, des soins de longue durée, ainsi que les services directs à la population, notamment par l’entremise d’un identifiant linguistique sur les pièces d’identité telles que la carte d’assurance maladie et le permis de conduire.
- Plus de détails : https://otn.ca/how-is-otn-making-difference-in-ontario/telemedicine-in-ontario/
- Plus de détails : https://www.ontario.ca/page/get-medical-advice-telehealth-ontario
- Plus de détails : https://support.otn.ca/en/improving-access-francophone-mental-health-and-addictions-services
- Plus de détails : https://otnhub.ca/patient-care/telepsychiatry/
- Plus de détails : https://support.otn.ca/sites/default/files/files/site_coordinators/bulletin/OTN+Update+-+Sept+2011.pdf
- Plus de détails : http://www.health.gov.on.ca/en/public/programs/flhs/highlights.aspx
- Plus de détails : http://www.reseausantene.ca/directory-of-french-speaking-health-care-professionals/
- Supra, note 83.
- Supra, note 117, p. 14.
- Plus de détails : https://csfontario.ca/en/rapports/ra1617/bilan/services-directs-communaute/7-5-enjeux-courants/la-lentille-francophone