4. Formation et éducation postsecondaire
Les établissements d’enseignement postsecondaire sont parmi les acteurs les plus importants dans la préparation des Ontariens au nouveau marché du travail. Afin de faire face aux éventuelles perturbations du marché du travail, il est toujours primordial de veiller à ce que le plus grand nombre d’Ontariens possible, y compris les francophones, aient accès aux études postsecondaires. Avoir des collèges et des universités désignés qui offrent bon nombre de programmes en français est primordial. Ces institutions forment les étudiants à devenir des professionnels bilingues qualifiés, prêts à s’insérer dans la population active. Toutefois, le Commissariat l’a maintes fois exposé, l’écart entre les programmes de langue anglaise et de langue française de ces établissements demeure notable, surtout dans le Centre-Sud-Ouest151.
En 2017, l’annonce du gouvernement provincial de son intention de mettre sur pied à Toronto l’Université de l’Ontario français venait répondre à ce besoin et a présenté la Loi de 2017 sur l’Université de l’Ontario, dans le cadre d’un énoncé économique l’automne dernier. Le 9 avril 2018, la plupart des articles de la Loi sont entrés en vigueur et le premier conseil des gouverneurs de l’Université a été nommé pour poursuivre les travaux préparatoires nécessaires afin d’atteindre l’objectif du gouvernement d’ouvrir une nouvelle université pour les étudiants à l’automne 2020. L’Université vise aussi à combler de nets manques de main-d’œuvre. Les employeurs de la région trouvent difficile de recruter des employés compétents en français, surtout dans les secteurs de l’éducation, de la santé, des finances, du commerce, des communications et des technologies, en administration et dans la fonction publique152. C’est pourquoi la nouvelle université propose une démarche collaborative d’élaboration de cursus avec d’autres universités et collèges.
Les programmes seront d’abord structurés autour des grands enjeux sociaux d’aujourd’hui comme la pluralité humaine, le cadre urbain, l’économie mondialisée et la culture numérique. Ensuite, l’élaboration de cursus communs unilingues français avec d’autres établissements bilingues vise à combler les pénuries de main-d’œuvre grâce à la formation et au perfectionnement professionnel de la main-d’œuvre. Enfin, l’Université propose une accréditation en français aux étudiants francophones et francophiles inscrits dans des universités partenaires de langue anglaise153. Il y a lieu d’encourager cette approche et ce type de programmes plutôt novateurs qui, entre autres, reflètent les compétences transformatrices. Il y a toutefois un bémol.
L’arrivée de cette université pourrait largement laisser pour compte les populations francophones du Nord. Actuellement desservies par plusieurs institutions de langue française et bilingues, certaines régions du Nord ont récemment vécu des suppressions ou des suspensions de programmes postsecondaires, d’importants resserrements budgétaires, voire des fermetures complètes de campus.
Dans cet esprit, le commissaire propose des pistes de réflexion pour préserver le dynamisme des populations francophones et minimiser l’impact des transformations liées au marché du travail sur celles-ci.
Les technologies continueront de transformer en profondeur notre économie et notre société. C’est pourquoi le commissaire recommande d’inclure un prisme technologique lors de prise de décisions, d’élaboration ou de création de programmes. De la même manière que la Lentille francophone, ce prisme technologique permettrait à tous les ministères de se pencher sur les effets positifs ou négatifs qu’auront les technologies et d’en étudier les répercussions sur les francophones.
Le commissaire invite aussi le gouvernement à renforcer son soutien aux établissements d’éducation de langue française et bilingues pour attirer davantage d’enseignants de français qualifiés dans la province. Attirer des élèves vers le domaine de l’enseignement en Ontario, puis recruter et accréditer des enseignants qualifiés formés dans d’autres pays francophones font tout autant partie des solutions. Des collaborations avec l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario et Destination Ontario « français », par exemple, pourraient êtres explorées. De la même manière, les collaborations semblables à celles proposées par l’Université de l’Ontario français dans le développement de programmes novateurs doivent se multiplier.
Autre soutien à accroître, celui envers les établissements de langue française dans la conception et l’approbation de programmes, en portant une attention particulière aux besoins uniques des travailleurs francophones susceptibles d’être victimes de suppressions d’emplois d’ici 2028. La création de nouvelles facultés dans les établissements d’enseignement postsecondaires ou collégiaux, offrant plus de possibilités aux Franco-Ontariens vivant dans le Nord, serait aussi un avantage concret.
Comme le commissaire l’a démontré, pour que la province respecte ses engagements selon les termes de la Loi sur les services en français, il sera capital d’éliminer les pénuries de main-d’œuvre dans les secteurs de l’éducation, de la santé, de la finance, du commerce, des communications et des technologies, dans l’administration et dans la fonction publique154. Un moyen utile d’y parvenir est la formation continue au niveau linguistique. L’Ontario devrait davantage se servir de son bilinguisme et privilégier ces formations préparatoires au marché changeant du travail. L’étude des langues rejoint les compétences globales et constitue un atout précieux pour les francophones. Mettre l’accent sur les programmes de français langue seconde intensifs et d’immersion semble essentiel. En outre, l’offre de bourses postsecondaires aux étudiants anglophones désirant étudier en français est une récente initiative prometteuse du gouvernement fédéral.
Enfin, l’immigration va contribuer de manière importante à dessiner l’avenir de la main-d’œuvre francophone. Le commissaire favorise cet élan et suggère des réflexions quant à la mise en place d’une politique d’assouplissement des frais de scolarité pour les étudiants francophones internationaux prêts à s’engager à rester dans leur communauté afin d’y travailler. Ainsi, les étudiants immigrants francophones assureraient de former une partie de la main-d’œuvre de demain, tout en contribuant à la vitalité et au développement économique de la population francophone. L’approche cadre parfaitement avec la cible de 5 % d’immigration francophone que s’est fixée la province, et qui est encore bien loin d’être atteinte.
RECOMMANDATION 13
Le commissaire recommande à la ministre déléguée aux Affaires francophones de développer, en collaboration avec ses collègues du Cabinet, une stratégie globale de ressources humaines en français. Cette stratégie interministérielle aura pour objectif essentiel de s’assurer d’avoir une main-d’œuvre compétente, efficace et bilingue partout en Ontario. Elle devra proposer des solutions novatrices pour :
- L’accroissement du nombre d’enseignants qualifiés en français;
- la conception de nouveaux programmes en français, y compris pour le Nord;
- la promotion et l’acquisition du bilinguisme comme compétence globale en matière d’emploi;
- le soutien à l’immigration permanente pour les étudiants francophones internationaux.
- Ibid.
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Plus de détails :
http://www.tcu.gov.on.ca/epep/publications/ConseilPUFO-aug2017-f.pdf - Ibid.
- Plus de détails : http://www.tcu.gov.on.ca/epep/publications/ConseilPUFO-aug2017-f.pdf