4. Stratégies à raffiner
Destination Ontario
Au sujet de la promotion et de l’attraction, l’Ontario a fait des efforts conséquents dans les dernières années. Sur le modèle du projet fédéral, l’ancien ministère a par exemple lancé le projet pilote Destination Ontario pour promouvoir la province auprès de candidats potentiels d’expression française au Maroc. Une délégation ontarienne s’est rendue au Maroc pour tenir des séances d’information et effectuer des activités de réseautage en février 2018.
Pour les prochaines éditions, il y a lieu de nommer explicitement l’initiative Destination Ontario français pour mettre l’accent sur l’aspect francophone. Une source d’inspiration potentielle est Destination Acadie en Atlantique41. Lors de l’édition 2018, la Société économique de l’Ontario a été invitée à faire partie de la délégation ontarienne dans le but d’offrir davantage de perspectives et de soutien aux futurs immigrants francophones en ce qui concerne le marché du travail de l’Ontario42. À l’avenir, il serait pertinent d’élargir cette participation à des organismes provenant d’autres secteurs pour promouvoir la vie en français dans son ensemble. L’initiative Destination Ontario au Maghreb est sans doute un premier pas mais ce n’est pas suffisant pour l’atteinte de la cible de 5 %43.
Occasions à saisir
Il convient de prendre un peu de recul afin de percevoir les possibilités plus globales. L’Ontario est en effet une province « à part » au Canada et en Amérique du Nord : elle abrite à la fois la capitale du Canada et une métropole internationale, en plus d’être située au centre du Canada et de jouir d’un dynamisme économique de par sa proximité avec la région des Grands Lacs.
La province s’inscrit dans un contexte résolument multiculturel, puisqu’un tiers de la population de la province est immigrante et que cette proportion s’accroît avec le temps. L’Ontario dispose également d’une grande variété de types de communautés d’accueil44, pouvant répondre à des attentes et des besoins fort distincts des nouveaux arrivants. Il s’agit d’atouts que la province peut mettre de l’avant lors d’activités de promotion à l’étranger.
L’Ontario peut innover davantage dans son effort de recrutement et de promotion, par exemple en explorant le potentiel que représente l’Afrique subsaharienne. En effet, 37,5 % des immigrants francophones récents de l’Ontario proviennent déjà de cette région45. La table est mise pour maximiser les possibilités liées à ce bassin prometteur d’immigrants francophones, notamment en effectuant des missions ciblées. Le Canada (avec Destination Canada), le Québec, le Nouveau-Brunswick et la plupart des provinces ciblent surtout les bassins français, belge, suisse et maghrébin. Mais plusieurs enquêtes démontrent que l’avenir de la francophonie mondiale se trouve également en Afrique subsaharienne. L’Ontario doit renforcer son rôle de leader dans la francophonie hors Québec et recruter en Afrique subsaharienne.
D’ailleurs, il ressort d’un sondage effectué auprès d’étudiants internationaux fréquentant un des établissements d’enseignement supérieur membres du Bureau canadien de l’éducation internationale46 que les candidats de cette région ont davantage tendance à rester au pays (et donc en Ontario) par rapport à d’autres qui seraient plus portés à retourner dans leur pays d’origine.
En effet, le français est une des langues les plus enseignées au monde, et ce bien au-delà des pays dont la langue officielle ou la langue principale d’enseignement est le français. Les réseaux d’établissements français ou francophones (Alliances françaises, Missions laïques, etc.) par exemple, notamment en Amérique latine, sont autant de lieux qu’il serait utile d’explorer.
Création de l’Université de l’Ontario français
« L’existence d’une université de langue française de haut calibre à Toronto, constituerait un facteur déterminant dans l’atteinte future de cet objectif [cible de 5 %], grâce au recrutement d’un corps professoral d’excellence en provenance de la francophonie (canadienne et internationale), et grâce au recrutement d’étudiants internationaux parmi les plus prometteurs 47. »
– Dyane Adam
Cette perspective doit permettre à l’Ontario de diversifier son offre en matière d’institutions d’enseignement postsecondaire de calibre international et d’attirer de nouveaux étudiants internationaux francophones. De 2016 à 2029, le nombre de titulaires d’un permis d’études provenant de pays francophones suivra une tendance à la hausse. Il est d’ailleurs estimé que de 15 318 à 16 850 titulaires poursuivront des études en français en Ontario. Le rapport Adam considère quant à lui que la nouvelle université de langue française à Toronto devrait recevoir de 1 000 à 1 200 de ces étudiants.
Ces initiatives doivent s’accompagner également d’une présence plus forte et plus fréquente dans les foires d’emploi ou les grands événements liés aux études et à l’enseignement supérieur. Dans les activités de promotion auprès de futurs étudiants, il est pertinent d’insister sur la possibilité de poursuivre des études en français tout en évoluant dans un milieu majoritairement anglophone favorable à l’apprentissage de cette langue.
Volet Travailleurs qualifiés francophones
Une mesure importante pour promouvoir le recrutement de professionnels francophones bilingues est le volet Travailleurs qualifiés francophones du Programme ontarien des candidats à l’immigration48. Ce volet semble avoir eu un impact très positif sur les nominations de candidats d’expression française provenant du bassin Entrée Express. Les données semblent dénoter une amélioration non négligeable quant au recrutement et à l’attraction de nouveaux arrivants francophones via ces programmes49.
Immigration francophone 2017 | Nombre de personnes sélectionnées |
---|---|
Candidats sélectionnés dans le volet pour les travailleurs qualifiés francophones | 259 |
Candidats sélectionnés dans tous les autres volets qui ont indiqué le français comme langue maternelle | 7 |
Candidats sélectionnés dans tous les autres volets qui ont indiqué le français comme langue préférée de correspondance (doublons ci-dessus exclus) | 5 |
Total de candidats francophones sélectionnés | 271 |
Total de candidats sélectionnés dans le Programme ontarien des candidats à l’immigration | 6 508 |
Proportion des candidats sélectionnés francophones | 4,2 % |
Source : Ancien ministère des Affaires civiques et de l’Immigration de l’Ontario
Le volet exige des candidats une bonne maîtrise de l’anglais. Cela tend à écarter les francophones qualifiés qui ne sont pas suffisamment bilingues. De plus, les candidats anglophones d’autres volets n’ont pas l’obligation de maîtriser le français, ce qui crée un déséquilibre dans les exigences. Le programme a connu un certain succès en 2017 et il est probable que le nombre de candidats francophones admis augmenterait encore avec l’élimination d’une telle barrière. Il conviendrait de les orienter dès que possible vers les programmes de formation linguistique en fonction de leurs besoins.
Par ailleurs, le Programme régulier des travailleurs qualifiés québécois50 considère que le fait d’avoir un ou des enfants fait partie des facteurs de sélection et a inclus cette donnée dans la grille de pointage. Il s’agit d’une initiative qui favorise le recrutement de familles entières et qui peut constituer une piste intéressante, y compris pour l’Ontario.
- Pour plus de détails : http://vivreenacadie.ca/index.php/destination-acadie (page consultée en mars 2018).
- Pour plus de détails : https://l-express.ca/succes-de-destination-ontario-au-maroc/ (page consultée en mars 2018).
- Plus de détails : https://onfr.tfo.org/destination-ontario-au-maroc-et-en-algerie-quels-benefices/ (page consultée en mars 2018).
- Belkhodja, C. et C. Traisnel, Immigration and Official Language Minority Communities – Survey of Research of the Past Five Years from the Perspectives of the Communities, Government Institutions and Researchers, Symposium de la recherche sur les langues officielles, Ottawa, 2011.
- Plus de détails sur les pays d’origine des immigrants francophones en annexe.
- Pour plus de détails : http://net.cbie.ca/download/CBIE-%20RECHERCHES%20EN%20BREF%203%20-%20%C3%89tudiants%20internationaux%20francophones%20au%20Ca….pdf (page consultée en avril 2018).
- Conseil de planification pour une université de langue française, Innover localement, Exceller mondialement : Proposition pour une université de langue française en Ontario, 2017, p. 48.
- Pour plus de détails : http://www.ontarioimmigration.ca/prodconsum/groups/csc/@oipp/documents/document/oi_fr_fssw_010517.pdf (page consultée en mars 2018).
- En raison du caractère très récent des données, il n’est pas possible de savoir combien de ces candidats sélectionnés sont arrivés. Par ailleurs, puisque IRCC ne calcule pas les francophones de la même façon que l’ancien ministère des Affaires civiques et de l’Immigration, il est impossible de faire des comparaisons dans le temps ou avec les volets fédéraux.
- Pour plus de détails : http://www.immigration-quebec.gouv.qc.ca/fr/immigrer-installer/travailleurs-permanents/conditions-requises/index.html (page consultée en avril 2018).