Statut des RLISS et des fournisseurs de services de santé
Des lacunes importantes en matière d’accès à des services de santé en français par les patients francophones existent toujours :
- Le patient francophone ne sait pas où obtenir les services de santé en français ;
- Il n’y a pas suffisamment de fournisseurs de services de santé qui offrent des services en français ;
- Puisque la majorité des fournisseurs de services de santé ne sont pas tenus par la loi d’offrir des services en français, la qualité et la fréquence de ces services peut en souffrir.
Le point commun de ces enjeux est les RLISS. En vertu de la LISSL, ils ont l’obligation de s’assurer d’une prestation adéquate de services de santé dans leur zone, en anglais comme en français. Pour ce qui est des services de santé en français, c’est évidemment plus difficile : les RLISS vont vraisemblablement avoir de la difficulté à notamment comprendre les besoins des communautés francophones et trouver les fournisseurs de services de santé appropriés.
Le législateur a prévu ce problème, et a donc créé les Entités de planification de services de santé en français. Leur rôle consiste à conseiller les RLISS et à participer activement et pleinement à la planification et à la coordination du système de santé en français. Les Entités doivent aussi appuyer les RLISS dans l’identification des fournisseurs de services qui devraient offrir des services en français. Faire autrement entraînerait des risques et des coûts plus élevés pour les RLISS.
Malgré le fait que les Entités ne soient pas impliquées dans la prestation des services, elles jouent un rôle essentiel dans le repérage des fournisseurs de services de santé en français et la communication de cette information aux patients francophones. En d’autres mots, lorsqu’un patient cherche un spécialiste de santé francophone, il devrait pouvoir facilement trouver cette information auprès de l’Entité avec la collaboration du RLISS. Il est possible que l’Entité confirme qu’il n’y a pas de fournisseur de service qui pourrait soigner le patient en français.
Selon le ministère et les RLISS, il y a 4 catégories de fournisseurs de services de santé :
- Les fournisseurs de services désignés en vertu de la LSF
- Les fournisseurs de services pré-désignés (ou identifiés)
- Les tierces parties
- Les fournisseurs de services qui n’ont aucune obligation
Les catégories 1, 3 et 4 sont moins problématiques. Un fournisseur de services désigné est assujetti à la LSF et le RLISS demeure responsable de la qualité des services. Les RLISS reconnaissent que les fournisseurs de services qui travaillent dans le domaine de soins à domicile sont en effet des tierces parties visées par le règlement 284/11 ; toutefois, ces fournisseurs de services sont peu nombreux puisque la majorité des fournisseurs de services financés par les RLISS entrent dans la catégorie 2. Les fournisseurs de services qui n’ont aucune obligation de services en français se retrouvent habituellement dans une région qui n’est pas désignée en vertu de la Loi.
Le nœud du problème se trouve à la catégorie 2. Selon les RLISS et le ministère, bien que ces fournisseurs de services aient été identifiés pour offrir des services de santé en français et qu’ils concluent des ententes pour la prestation de services, ils ne sont pas des tiers en vertu du règlement 284/11, et donc les RLISS n’ont pas d’obligation juridique de vérification. Cette interprétation est problématique : l’obligation d’offrir des services en français n’est pas encadrée par une loi, que ce soit la Loi ou la LISSL. Ces fournisseurs de services n’offriraient donc pas de services au nom du RLISS et du ministère de la Santé. Avec un tel argumentaire, on s’éloigne considérablement de l’esprit de la Loi.
En effet, la nature du problème réside dans une distinction sémantique nébuleuse voulant que la majorité des fournisseurs de services, comme les hôpitaux, reçoivent une subvention du RLISS et non des sommes accordés en vertu d’un contrat. Cette différence expliquerait la position des RLISS selon laquelle ils ne peuvent imposer l’obligation aux fournisseurs de services d’offrir leurs services en français. Une position que partage le ministère. Cette interprétation des RLISS et du ministère est contraire tant à la lettre qu’à l’esprit de la Loi de 2006 sur l’intégration du système de santé local et de la Loi. Voilà plusieurs rapports annuels où le commissaire dénonce cette interprétation juridique. Comme si la vérificatrice générale, par exemple, refusait d’enquêter sur un hôpital si ses subventions provenaient du RLISS et non d’un contrat. Cela n’a aucun sens. Ce sont les mêmes fonds publics qui proviennent des mêmes contribuables et qui visent à financer des services offerts dans le cadre d’un programme gouvernemental.
Les conséquences de cette perception à deux niveaux sont réelles sur les clients et les patients du système de santé.
Le concept peut être inquiétant : si les fournisseurs de services de la catégorie 2 deviennent des tiers visés par le règlement 284/11, les RLISS devront bonifier leurs ententes sur les services de santé en français et vérifier la qualité de ces services offerts par des fournisseurs. De plus, les questions concernant la capacité et la qualité de service sont importantes. Ceci peut donc être perçu comme une lourde tâche.
Mais ce ne sont pas tous les fournisseurs de services qui ont l’obligation d’offrir des services en français. Le RLISS, de concert avec l’entité de planification, doit décider lesquels des fournisseurs de services sont nécessaires pour les communautés francophones. En adoptant une approche pragmatique et fondée sur des preuves, soutenue par l’expertise des Entités, les RLISS pourront coordonner la prestation de services en français par un éventail de fournisseurs de services spécifiquement choisis et appuyés.
Recommandation 7
Le commissaire recommande au ministre de la Santé et des Soins de longue durée d’émettre une directive claire engageant les RLISS à :
(a) vérifier la prestation de services de santé par les fournisseurs dont certains services sont ciblés pour être offerts en français ; et
(b) faire en sorte que les contrats de service et les ententes de responsabilisation signés avec ces fournisseurs de services comportent des obligations claires en matière de services en français.