Rapport annuel 2013-2014

Une institution francophone s’enracine

Version PDF

Aînés

« Ma mère a 92 ans; elle est aveugle et en perte d’autonomie. Elle se fait parler anglais presque tous les jours, tant par le personnel infirmier (qui l’aide à prendre ses médicaments, lui ôte son appareil auditif) que par les employés de soutien (qui l’habillent, lui donnent son bain), et ce, dans une communauté très francophone. Comment peut-on parler d’un service de qualité quand celui-ci n’est pas offert dans la langue de la personne, surtout quand il s’agit d’une personne âgée? »

Une plaignante

Les enfants et les jeunes ne constituent pas le seul groupe d’âge qui capte l’attention du Commissariat. Les aînés forment eux aussi un groupe qui mérite une attention particulière lorsqu’il s’agit des services en français. Les aînés francophones, tout comme leurs compatriotes anglophones, ont le droit de bénéficier, dans leur langue, de programmes qui leur permettront de vivre une vie saine et active et, si leur état le nécessite, d’obtenir des soins et des services de soutien dans le respect et la dignité.

Comme c’est le cas pour les enfants et les jeunes, le gouvernement propose de nombreux servicespour assurer la meilleure qualité de vie qui soit aux personnes âgées de la province. Et, comme c’est le cas pour les enfants et les jeunes, plus le nombre de programmes est élevé, plus le risque de ratés en matière de services en français est élevé. Chez une population vieillissante, ces ratés peuvent avoir des effets dramatiques.

Il est naturel qu’un groupe dont le mieux-être, voire la survie, dépend de programmes de soutien craigne de porter plainte à propos de ces services. Si le gouvernement ne semble pas reconnaître le caractère essentiel d’une approche proactive, le Commissariat, lui, brosse lentement mais sûrement un tableau du redressement requis des difficultés que connaissent les aînés en matière d’accès aux services en français, en se fondant non seulement sur les plaintes officielles, mais aussi sur les signalements officieux, sur une surveillance active du secteur, sur ses rapports avec les groupes visés, et… sur le gros bon sens.

Voici quelques situations qui illustrent la nécessité d’interventions actives en matière de services en français destinés aux aînés :

• Dans son rapport annuel 2008-2009, le commissaire parlait de l’absence de soins spécialisés de longue durée en français à Toronto. Depuis, grâce aux efforts des Réseaux locaux d’intégration des services de santé (RLISS) du Centre et du Centre-Est, la situation semble avoir été corrigée à Toronto. Il a toutefois fallu une mobilisation considérable, dont une large couverture médiatique et des pétitions, pour faire valoir son importance. Une telle mobilisation ne devrait pas être nécessaire dans les autres régions de l’Ontario pour que les lits de soins de longue durée soient gérés en tenant compte des besoins des francophones.

• Un citoyen francophone a téléphoné à quelques reprises à la ligne ACTION des soins de longue durée du gouvernement afin d’exprimer ses vives préoccupations quant à la façon dont un parent était traité dans une résidence pour personnes âgées. Chaque fois, le service en français était absent. Or, les difficultés qu’éprouvait le parent âgé étaient justement liées au fait qu’il était marginalisé parce qu’il était francophone. Difficile d’imaginer que le plaignant trouverait une oreille bienveillante dans de telles circonstances. Ce cas illustre la nécessité non seulement d’offrir des services en français, mais aussi d’avoir du personnel — peu importe sa langue — qui soit sensible à la réalité du francophone âgé en milieu minoritaire.

• Animé par la louable intention de fournir des soins coordonnés, efficients et efficaces aux aînés et aux personnes ayant des besoins complexes, le ministère de la Santé et des Soins de longue durée a créé les maillons santé communautaires, qui réunissent divers intervenants, dont les fournisseurs de soins de santé familiale, les spécialistes, les hôpitaux ainsi que les organismes offrant des soins de longue durée, des soins à domicile et d’autres services de soutien communautaire. Or, des doutes subsistent quant à la prise en compte des besoins des francophones dans l’élaboration d’un tel système et la capacité du système en question de prendre en charge, en français, des aînés et autres citoyens francophones ayant des besoins de santé spécifiques.

• Dans le cadre de la réalisation de sa Stratégie pour le bien-être des personnes âgées, le gouvernement a investi des sommes considérables dans l’augmentation de la prestation de soins à domicile et de la prestation de soins personnels par les organismes de soutien communautaire. Or, encore ici, un questionnement s’impose sur la prise en compte des besoins des francophones a priori.

Compte tenu de la croissance prévue du nombre d’aînés au cours des prochaines années, il sera nécessaire pour les intervenants du secteur du soutien aux aînés de faire des efforts proactifs pour incorporer la prise en compte des besoins des francophones dans leurs services. Certes, le commissaire entend garder l’œil sur la situation, mais il rappelle que, en fin de compte, cette responsabilité revient au gouvernement même.

Laisser un commentaire