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François Boileau
Commissaire aux services en français
J’ai eu la chance de me déplacer à Kingston hier pour participer à deux rencontres extrêmement enrichissantes.
Dans un premier temps, j’ai participé à la conférence « Leading Edge Practises in Bilingual Recruitment », à laquelle étaient présents près d’une centaine de représentants des agences désignées et d’autres organisations et entreprises de Kingston.
Je rappelle que la désignation de Kingston en vertu de la Loi sur les services en français avait été annoncée en juin 2006 et que depuis le 1er mai 2009, tous les bureaux du gouvernement de l’Ontario situés dans cette région offrent des services en français.
C’est dans ce contexte que j’ai laissé de côté mon discours traditionnel pour m’adresser plus directement aux gens qui travaillent dans le secteur des services sociaux et communautaires dans la région et qui prennent à cœur les besoins de leurs clients. Je leur ai souligné à quel point il est primordial d’offrir des services en français activement, non pas seulement parce que les organismes de la région sont dorénavant obligés de le faire, mais aussi parce qu’à la base, cela contribue au mieux-être et au développement de toute leur communauté.
L’événement en tant que tel a aussi été l’occasion parfaite pour rappeler pourquoi nous avons une Loi sur les services en français et les raisons pour lesquelles il est crucial d’offrir des services en français, surtout lorsque ces services s’adressent à des populations fragilisées.
Je remercie le Réseau régional de langue française du Sud-Est et tous ses partenaires pour leur leadership dans l’organisation de ce magnifique événement.
Par ailleurs, lors de ce passage à Kingston, j’ai aussi visité l’École secondaire publique Mille-Îles où j’ai discuté de l’importance des services en français avec une douzaine d’étudiants de 11e et 12e années. Ceux-ci ont participé activement à la discussion et je les félicite de prendre aussi à cœur leurs droits linguistiques et leur héritage culturel. Je remercie la directrice de l’école, Élaine Constant, de m’avoir si chaleureusement accueilli dans cette toute nouvelle école.
Je quitte maintenant bientôt pour Ottawa, où je participerai à plusieurs événements au cours des prochains jours, dont un match contre les Grandes Étoiles du hockey de la ligue nationale organisé par la Fondation franco-ontarienne ce samedi (eh oui !). En espérant que je revienne à Toronto en un morceau, je partagerai avec vous mon expérience complète la semaine prochaine !
Excellente nouvelle: le gouvernement fixe à 5% la cible à atteindre pour l’immigration francophone. Cet objectif audacieux constitue une très bonne nouvelle pour les francophones, car cela contribuera assurément à la vitalité et au développement de la communauté francophone.
En effet, le gouvernement vient de publier sa stratégie en matière d’immigration. Intitulé une Nouvelle orientation : Stratégie ontarienne en matière d’immigration, cette initiative met de l’avant un certain nombre d’objectifs comme l’augmentation de la proportion d’immigrants économiques pour atteindre jusqu’à 70% ou encore le doublement de la limite du Programme de désignation des candidats de la province pour atteindre 2 000 personnes en 2013.
En somme, cette stratégie comporte des initiatives fort intéressantes. C’est le cas notamment au niveau de la formation avec l’objectif d’améliorer l’accès aux programmes de formation en français et en anglais. Cependant, il reste, encore, à définir les mesures qui seront mises en place pour les atteindre d’autant que sur certains dossiers les deux paliers du gouvernement se partagent les compétences notamment dans le domaine de la sélection et de l’accueil des immigrants.
Enfin, il importe de souligner que cette stratégie mise également sur la collaboration tant à l’interne que l’extérieur de l’appareil gouvernemental. L’idée de créer une table ministérielle annuelle avec les employeurs afin de discuter des besoins et des défis en matière d’immigration ainsi qu’un forum annuel des ministres pour diriger une approche « sans fausse route » relativement aux services d’immigration offerts à l’échelle du gouvernement illustre parfaitement cet état d’esprit. Une collaboration qui sera aussi nécessaire pour s’assurer que les deux paliers du gouvernement utilisent les mêmes critères pour désigner les francophones, c’est à dire la Définition inclusive de francophone de l’Ontario. À suivre donc!
J’aimerais aujourd’hui revenir sur un changement important en 2007, soit lorsque l’Assemblée législative a modifié la Loi sur les services en français pour créer le poste de commissaire et, par le fait même, le Commissariat aux services en français.
C’était il y a cinq ans, à un moment où le législateur voulait donner un nouveau souffle à la mise en œuvre de la Loi pour assurer son plein respect, et surtout, voir à la réalisation de son double objectif mentionné précédemment, à savoir protéger la minorité francophone en Ontario et faire progresser le français en favorisant son égalité avec l’anglais. Ainsi, la création de ce poste a été largement perçue par la communauté franco-ontarienne comme un nécessaire pas en avant.
Mais il y a aussi eu des critiques en 2007, dont celle de l’Opposition officielle qui, bien que contente de la nomination du titulaire actuel au poste de commissaire, dénonçait le fait que le commissaire relevait de la ministre déléguée aux Affaires francophones plutôt que de l’Assemblée législative, contrairement aux autres mandataires du Parlement. Selon cette critique, le processus manquait de transparence puisque l’on demandait à l’enquêteur de se rapporter directement à l’institution qui pouvait faire l’objet d’une enquête.
Par la suite, le Nouveau Parti démocratique en a fait un cheval de bataille, en déposant le projet de loi 193 en mai 2011, puis le projet de loi 49 en mars 2012 pour que le commissaire relève directement de l’Assemblée législative. Cette question a également été soulevée lors de la campagne électorale précédant l’élection d’octobre 2011 et, à ce moment, le gouvernement n’a pas fermé la porte à la possibilité d’accorder une réelle indépendance au commissaire.
J’avais souvent été appelé à me prononcer sur cette question, mais je n’avais pas voulu partager mon opinion jusqu’à maintenant, principalement pour éviter de me mêler d’un enjeu électoral. Toutefois, ce scrutin étant chose du passé, et après avoir discuté directement avec les représentants des trois partis de l’Assemblée législative, j’estime qu’il est de mon devoir de donner mon avis au gouvernement, comme l’exige la Loi.
Je jouis, depuis les débuts de mon mandat, d’une indépendance qui honore l’actuelle ministre déléguée aux Affaires francophones. En effet, je me suis vu accorder l‘autonomie nécessaire pour créer mon bureau, pour établir les limites de mon mandat et pour toutes les autres activités du Commissariat.
Cela dit, tout pourrait basculer sur le plan politique et administratif en remplaçant ne serait-ce qu’une seule personne, que ce soit la ministre déléguée aux Affaires francophones ou le commissaire actuel. Car ce poste exige de son titulaire d’avoir la capacité, la volonté et la fermeté nécessaire pour garder le cap sur une mise en œuvre efficace de la Loi sur les services en français.
Il est important, voire essentiel, d’avoir les coudées franches. Et avoir les coudées franches signifie être en mesure d’agir en fonction de ses connaissances, de ses observations et de son indépendance d’esprit. Le fait que ce poste soit tributaire des aléas politiques du moment ne procure pas l’autonomie nécessaire au plein exercice des fonctions qui s’y rattachent.
Nul besoin de chercher bien loin pour constater la fragilité d’un poste qui relève d’un ministre au lieu d’un Parlement ou d’une Assemblée législative. On se souviendra de l’épisode de Statistique Canada, l’an dernier, lorsque le ministre responsable de cette agence fédérale a tôt fait de rappeler à tous, y compris et surtout aux hauts dirigeants de cet organisme, qu’ils relevaient d’un ministre et qu’ils n’étaient justement pas indépendants, contrairement à ce que plusieurs croyaient depuis des décennies. Le statisticien en chef, rappelons-le, a dû alors démissionner.
Dans les prochaines semaines, je passerai en revue d’autres raisons qui expliquent ce pourquoi il est primordial pour le commissaire de devenir indépendant.
Hier soir, je me trouvais à Rockland afin de participer aux célébrations du 15e anniversaire de Retraite en action. Je remercie encore les organisateurs de m’avoir invité. J’ai beaucoup apprécié mes échanges avec tous ces jeunes (sinon de cœur) retraités, même si mon vol de retour a été annulé, gracieuseté de Sandy (je suis revenu au petit matin en voiture louée!).
J’ai fait sur place la rencontre d’un plaignant qui m’indiquait sa frustration de ne pas avoir reçu de nouvelles de sa plainte, outre l’accusé de réception, depuis bientôt presque une année. Il m’indiquait pourtant que son cas était relativement simple. De fait, je me suis souvenu de cette plainte, puisque je suis au courant de chacune d’entre elles. Le plaignant m’a dit qu’il ne valait donc pas la peine pour un citoyen de se plaindre au bureau du Commissariat aux services en français.
Bien que je comprenne parfaitement la position du plaignant, j’ai été navré d’entendre un tel commentaire et, surtout, ses doutes quant à la valeur de sa plainte et, au final, du travail du Commissariat. J’ai été navré parce que, je vous l’assure, l’équipe du CSF travaille fort comme je n’ai jamais vu un bureau de la fonction publique travailler ainsi. Mais avec seulement six personnes au CSF, moi compris, et seulement deux enquêteurs dont l’une est aussi la manager du bureau, la tâche est herculéenne. Notre très modeste budget, toujours menacé par le couperet, ne facilite pas les choses.
Nous recevons plus d’une plainte par jour. Tous les jours. C’est beaucoup considérant nos ressources, mais c’est aussi peu considérant l’ensemble des Franco-ontariens et Franco-ontariennes et le nombre de transactions au quotidien de tous ces gens avec le gouvernement provincial. De fait, en dépit de notre charge de travail élevée, nous aimerions recevoir davantage de plaintes, puisque c’est aussi notre pain et beurre! Nous considérons chaque plainte comme un mécanisme de rétroaction direct de contrôle de qualité des services du gouvernement.
Nous prenons peut-être du temps à vous répondre, j’en conviens, mais vous faites manifestement une différence. Il est quand même indéniable que nous avons tous ensemble fait des progrès considérables au cours des dernières années en matière de prestation de services en français. Et c’est grâce à vous, les plaignants!
Nous vous demandons patience et surtout, de continuer à nous faire part des manquements aux services en français de qualité. Voilà la seule façon où nous pourrons réaliser des progrès. Peut-être lentement, mais aussi sûrement. Si nous ne sommes pas mis au courant des problèmes, nous ne pourrons pas intervenir.
Nous aurons les chiffres définitifs du recensement de 2011 concernant la DIF seulement une fois que ces statistiques auront été compilées par l’Office des affaires francophones. Cela peut prendre plusieurs semaines encore et on ne s’attend pas à avoir ces nouvelles données avant, au minimum, le mois de décembre. Nous pouvons présumer évidemment que les chiffres seront nettement supérieurs à ceux de 2006, étant donné la croissance de la population francophone en Ontario, telle que définie par Statistique Canada.
Quoi qu’il en soit, il est indéniable qu’au-delà du symbole et des chiffres ajustés pour prendre en compte les quelque 50 000 francophones issus de l’immigration, l’adoption de la DIF a généré, et même renforcé, le sentiment d’appartenance à la communauté franco-ontarienne.
Dans mon rapport annuel 2010-2011, j’avais indiqué que j’effectuerais une analyse pour m’assurer que la méthode de calcul de la DIF était bien utilisée par le gouvernement de l’Ontario et par ses prestataires de services. Une telle analyse allait également permettre d’évaluer l’impact de cette définition sur les programmes et services gouvernementaux. Une série de questions a donc été transmise au gouvernement à cet effet.
Le gouvernement a reconnu qu’il existait une certaine incohérence dans l’utilisation des nouveaux critères pour calculer le nombre des francophones en Ontario malgré l’adoption de la DIF. En effet, certains ministères de même que leurs prestations de services ne semblent pas en faire un usage courant et systémique.
C’est le cas notamment du ministère des Services à l’enfance et à la jeunesse. En 2010, le Commissariat a reçu une plainte qui soulevait la question du financement de certains centres de la petite enfance dont les fonds proviennent de ce ministère en fonction de la proportion des enfants francophones desservis.
Les résultats de l’enquête ont démontré que le ministère utilisait l’ancienne définition non inclusive pour calculer l’octroi de son financement, ce qui avait pour effet de pénaliser les centres de la petite enfance dont la fréquentation avait connu une hausse de nouveaux arrivants francophones, notamment dans les pôles d’attraction comme la région de Toronto.
Toutefois, le gouvernement a indiqué au Commissariat que plusieurs ministères utilisent la DIF pour recueillir des données et pour vérifier le niveau et la qualité des services en français offerts directement par les ministères ou par des tiers. De plus, l’Office des affaires francophones s’est engagé à élaborer un plan de communication afin de mieux sensibiliser les ministères quant à l’utilisation de la nouvelle définition comme méthode de calcul commune. Quant aux organismes désignés, le gouvernement a souligné son intention de transmettre ce même message. Il reste, néanmoins, à déterminer le plan d’action et l’échéancier dans la conduite de cette initiative, lesquels je m’engage à suivre de près.
Ceci dit, le recensement nous permet tout de même de prendre connaissance de données fort intéressantes. Tout d’abord, malgré le fait que la population ontarienne ait une tendance à s’accroître plus rapidement que ne le fait la francophonie ontarienne, l’Ontario a connu, depuis le recensement de 2006, une hausse de plus de 5 % du nombre de personnes de langue maternelle française ; une hausse de 6 % du nombre de personnes qui utilisent le français le plus souvent à la maison ; et une hausse de près de 1 % du nombre de personnes qui ont le français comme première langue officielle parlée.
Une autre bonne nouvelle : le pourcentage de personnes qui ont pour langue maternelle le français en Ontario est resté stable depuis 2006, s’établissant à 4,4 %. Encore une fois, je rappelle que ces données ne tiennent pas compte de la DIF selon laquelle, en 2006, la population francophone représente en fait 4,8 % de la population ontarienne, soit 582 690 personnes.
Je tiens à spécifier que, tel qu’indiqué dans le rapport L’État de l’enseignement du français langue seconde au Canada publié en 2010 par Canadian Parents for French, le support des allophones pour la dualité linguistique demeure particulièrement élevé, foi de quoi le multiculturalisme ne s’avère pas « un ennemi » de la francophonie. Ce rapport avait entre autres déterminé que 40 % des parents allophones avaient inscrit leur enfant dans un programme d’immersion française.
En somme, les données du dernier recensement sont positives pour la communauté franco-ontarienne et, du coup, pour la société ontarienne. Ceci dit, il est vrai que la très forte majorité des nouveaux arrivants ne connaissent que l’anglais comme seule langue officielle. Voilà pourquoi j’ai recommandé au gouvernement de l’Ontario de se doter d’un comité consultatif chargé d’orienter les efforts du ministère des Affaires civiques et de l’Immigration dans le dossier de l’immigration francophone et de développer, de façon interministérielle et concertée, une stratégie d’accueil, de formation linguistique et d’intégration au marché du travail pour les nouveaux arrivants francophones. Vous pouvez en lire plus à ce sujet dans le chapitre 2 de mon rapport annuel 2011-2012.
Avec l’arrivée de toutes ces nouvelles données, je crois que le moment est venu de vous expliquer plus en détails ce en quoi l’application de la DIF s’avère importante en Ontario et au sein de chacun des ministères et organismes gouvernementaux. Je vous en parle davantage demain. C’est à suivre.