Mon dixième anniversaire au CSF
Le 4 septembre 2007, je débarquais seul à Toronto pour entamer un mandat de deux ans à la tête du nouveau Commissariat aux services en français de l’Ontario (CSF). Heureusement, les mandats sont aujourd’hui d’une durée de cinq ans; deux ans c’est bien trop court pour faire ses preuves de manière efficace. Des membres du personnel de l’Office des affaires francophones (à l’époque) avaient loué pour moi un bureau dans une tour commerciale située dans le coin de Bloor et Yonge. Un ordinateur, sans accès à l’intranet des ministères, donc pas d’accès à de l’information pertinente, une chaise, quelques feuilles de papier vierges, voilà tout ce que j’avais à ma disposition! L’OAF avait eu comme mandat de la Ministre (l’honorable Madeleine Meilleur) de me laisser tranquille; les fonctionnaires l’ont prise au mot.
Comme j’avais déjà reçu quelques plaintes à mon adresse électronique privée, avant même de débuter mon mandat, il ne faisait aucun doute que ma priorité serait d’établir un processus de réception des plaintes, tout en dotant le CSF d’un personnel qualifié pour les traiter. La tâche m’apparaissait énorme, mais ne me faisait pas peur car j’avais déjà fait l’expérience d’être le premier dirigeant d’une toute nouvelle entité, ayant été le premier directeur général du défunt Programme de contestation judiciaire, à Winnipeg. Ce qui me tenait éveillé la nuit, par contre, et encore quelques fois aujourd’hui, c’était l’éventualité de décevoir tout un peuple, qui comptait un peu sur moi pour freiner le recul et, dans la mesure du possible, pour faire avancer les choses de quelques pas, chemin faisant.
De fait, pour ne pas trop m’en faire, je ne m’étais fixé qu’un seul objectif : faciliter la tâche de mon éventuel successeur. Ainsi, je pouvais à loisir jeter les bases du Commissariat. Je me suis assuré que l’organisme puisse jouir d’une réputation, d’une efficacité basée sur la rigueur, ainsi que sur la volonté de faire une différence, le tout en agissant dans la plus grande indépendance possible. J’avoue, très humblement, que je crois avoir atteint mon objectif.
Sept mois plus tard, j’ai déposé mon tout premier rapport annuel, intitulé Paver la voie, qui comptait 28 pages et présentait trois recommandations systémiques, dont celle portant sur la définition inclusive de francophone. D’ailleurs, je me souviens fort bien de la réaction des hauts fonctionnaires, de leur étonnement surtout. Ce rapport s’inscrivait donc dans une stratégie d’affirmation de l’indépendance de ce bureau, au bénéfice de tous les citoyens de l’Ontario.
Je suis donc animé aujourd’hui d’un profond sentiment de reconnaissance de tout le chemin parcouru. Jamais, au grand jamais, je n’aurais pu accomplir tout ceci sans la collaboration exceptionnelle d’employés dévoués, dont trois qui m’accompagnent depuis leur arrivée en février 2008. Incidemment, les employés actuels de notre équipe sont à l’image de ce que je souhaitais donner au Commissariat : ils sont compétents, efficaces, empathiques, professionnels, passionnés et veulent faire une différence, chaque jour. Je les en remercie.
Mais je suis surtout reconnaissant envers toutes les personnes qui, en Ontario, m’ont ouvert leurs portes. Des déplacements, j’en aurai fait! On dira ce que l’on voudra sur mon passage au CSF, mais on ne pourra jamais me reprocher de ne pas être allé à la rencontre des citoyens. J’ai accepté toutes les invitations. Toutes. Ça me rappelle une anecdote. Tôt dans mon mandat, lorsque j’étais le seul et unique employé du bureau, je reçois une invitation pour me rendre dans le sud de la province à l’occasion d’un événement local. J’accepte donc volontiers. Quelques semaines plus tard, on me contacte pour retirer l’invitation, l’organisme ayant trouvé entretemps quelqu’un de local, plus connu. En raccrochant la ligne, mort de rires, je me disais à quel point il va y avoir du travail à faire! Et croyez-moi, nous avons travaillé fort au cours des dix dernières années. Nous avons célébré des victoires et connu aussi quelques désaccords avec le gouvernement, mais cela ne nous a pas empêchés de persévérer. Pour preuve, je vous invite à relire mon tout dernier rapport annuel, celui de 2016-2017, où je relate les 10 dernières années du CSF.
Nous avons encore beaucoup à accomplir et, comme nous l’avons mentionné au cours des derniers mois, nous avons établi un nouveau plan stratégique. Je peux donc vous assurer que j’entame cette deuxième décennie pleinement confiant que nous pourrons continuer à faire une différence au quotidien.