Déclaration aux médias

DÉCLARATION AUX MÉDIAS

POUR LA PUBLICATION DU

Rapport annuel 2012-2013

par

François Boileau

Commissaire aux services
en français de l’Ontario

Mercredi 5 juin 2013

13 h 30

Salle des médias

Édifice de l’Assemblée législative

Toronto (Ontario)

Icône PDF — PetitDéclaration aux médias

Mesdames et messieurs,

Bonjour,

Il me fait plaisir d’être ici aujourd’hui pour vous présenter mon sixième rapport annuel à titre de commissaire aux services en français de l’Ontario.

Ce sixième rapport s’intitule Une nouvelle approche.

Ce rapport annuel est particulier en ce sens qu’il couvre non seulement les activités du Commissariat durant l’année 2012-2013, mais présente aussi un bilan des six dernières années du Commissariat.

Il faut dire que ce rapport marque également pour moi le début d’un troisième et dernier mandat, d’une durée de cinq ans cette fois-ci.

Depuis les six dernières années, j’ai fait pas moins de 46 recommandations au gouvernement de l’Ontario. Et je peux vous dire que le dialogue recherché dès le départ avec le gouvernement et la population est bien enclenché.

En 2012-2013, le Commissariat a d’ailleurs travaillé très fort pour renforcer et mettre à profit ce dialogue, qui compend aussi parfois une collaboration, que ce soit en signant un protocole d’entente avec le Commissariat aux langues officielles du Canada ou un autre avec le Commissariat aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, ou encore en obtenant l’engagement concret du ministère du Procureur général à se mobiliser dans le dossier de l’accès à la justice en français en Ontario en publiant avec lui un communiqué conjoint.

Le Commissariat a aussi rencontré plusieurs organismes francophiles dont Canadian Parents for French (Ontario), par exemple. Car les francophiles rencontrent aussi un double défi, soit, d’une part, celui d’être reconnus comme des partenaires des communautés francophones, puis, d’autre part, celui de se tailler la place qui leur revient au sein de la société majoritaire.  Dans le monde d’aujourd’hui, où le règne des identités multiples ne doit plus faire peur, les francophones et les francophiles sont tenus de travailler ensemble afin d’assurer la pérennité de la langue française dans la province.

Statistiquement parlant, le Commissariat a reçu un total 349 plaintes en 2012-2013, foi de quoi les citoyens continuent eux aussi de participer au dialogue initié.

Je souhaite, bien entendu, que ce dialogue se poursuivre au cours des prochaines années.

C’est dans cette optique que je dresse, dans ce rapport annuel, le portrait du cheminement organisationnel du Commissariat, en relevant les principaux facteurs qui ont marqué son évolution depuis 2007, dont une augmentation de la population francophone de l’Ontario, et des ressources humaines et financières limitées.

J’explique en détail dans le premier chapitre comment ces éléments m’amènent aujourd’hui à doter le Commissariat d’une nouvelle approche pour guider nos actions et nos interactions avec les plaignants, les ministères et les autres organismes gouvernementaux.

À raison de près d’une plainte par jour et compte tenu de la présence de seulement trois enquêteurs, l’heure est venue pour le Commissariat d’adopter une nouvelle démarche de traitement des plaintes, une nouvelle approche.

Cette nouvelle approche se présente en cinq temps :

  1. Un changement de paradigme dans le traitement des plaintes ;
  1. Des interventions systémiques et plus ciblées ;
  1. La production de rapports d’enquêtes de longue haleine sur des sujets d’importance pour le développement de la population francophone de l’Ontario, comme celui que nous avons publié en juin dernier portant sur l’état de l’éducation postsecondaire en langue française dans le Centre-Sud-Ouest, intitulé Pas d’avenir sans accès, qui a fait des petits.
  1. Le développement de partenariats stratégiques ; et
  1. Un soutien accru aux citoyens coincés dans des situations où un manquement à la prestation de services en français risque de leur être préjudiciable.

En vertu de cette nouvelle approche, les plaintes reçues deviennent des signalements importants. Elles demeurent certainement toutes aussi importantes qu’auparavant, mais seront désormais consignées et analysées dans un contexte de résolution systémique de manquements à la Loi.

Mais cette nouvelle approche exige des ministères et autres organismes gouvernementaux un ajustement important quant au traitement de ces plaintes. Il s’agit d’une avenue à deux voies.

Au cours des six ans d’existence du Commissariat, les plaintes recevables ont été fondées à 95 %. Aussi, l’objet ne sera donc plus tant de savoir ce qui s’est passé le 28 juillet 2012 à 13 h 18 à un endroit précis, mais plutôt de reconnaître qu’il existe des écarts importants en matière de services en français et que l’organisme gouvernemental doive chercher à trouver des solutions permanentes au problème.

En vertu de cette nouvelle approche, je ciblerai deux ou trois enjeux fondamentaux dans chaque secteur et les présenterai aux dirigeants du ministère en question, et ce, que des plaintes aient été reçues à ce sujet ou non.

Dans le contexte de la nouvelle approche du Commissariat, je souhaite aussi me concentrer sur les populations qui sont les moins susceptibles de porter plainte au Commissariat, mais qui sont pourtant les plus vulnérables aux risques que pose tout manquement à la prestation de services en français. Ces populations, comme je les nomme dans mon rapport, sont des populations précarisées.

Les personnes âgées, les enfants, les personnes atteintes de troubles de santé mentale, les nouveaux arrivants et une multitude d’autres citoyens francophones font partie de ces populations parmi les plus fragiles pour lesquelles le gouvernement doit davantage se responsabiliser.

Nous avons remarqué, au fil des ans, un faible nombre de plaintes mettant en cause les ministères et organismes gouvernementaux travaillant de près avec les populations précarisées.

Mais il serait naïf de croire que le faible nombre de plaintes signifie que tous les programmes et services de ces ministères sont fournis en pleine conformité avec la Loi sur les services en français. En effet, les dispositions des populations précarisées font en sorte qu’elles sont justement moins enclines à porter plainte, d’où souvent le faible nombre de plaintes à l’endroit de ces ministères.

C’est pourquoi en guise de première recommandation de ce rapport, je recommande à la ministre déléguée aux Affaires francophones de développer, en concertation avec ses collègues du Cabinet, un plan d’action pour s’assurer que les populations précarisées aient un accès réel aux services en français, et ce, conformément à la lettre et à l’esprit de la Loi sur les services en français.

Il s’agit pour moi de la recommandation centrale de ce rapport, qui cerne un premier problème systémique de grande échelle à l’intérieur de plusieurs ministères et organismes gouvernementaux, et qui laisse entrevoir le type de responsabilisation auquel je m’attends du gouvernement en vertu de notre nouvelle approche.

Bien sûr, on ne peut pas s’attendre non plus à ce qu’un citoyen qui fasse partie d’une population précarisée exige des services en français à chaque fois que ceux-ci ne lui sont pas offerts de façon active.

Je reviens donc ici sur la première recommandation de mon rapport annuel 2009-2010 dans laquelle je recommandais à la ministre déléguée aux Affaires francophones qu’une directive sur l’offre active en matière de services en français soit mise en place.

En réponse à cette recommandation, le gouvernement a produit un guide de l’offre active et a développé des lignes directrices. Mais au gouvernement, la différence entre des lignes directrices et une directive est la même que celle entre un conseil et un ordre. Et le fait de conseiller aux ministères et autres institutions de mettre en place une offre active de services en français à des enfants dans le besoin, à une jeunes mère aux prises avec des problèmes de dépendance ou à des personnes atteintes de troubles de santé mentale par exemple, est loin d’être suffisant. Cette offre active, il faut l’exiger pour eux.

Dans ma deuxième recommandation, je reviens donc à la charge en recommandant à la ministre déléguée aux Affaires francophones qu’une directive explicite en matière d’offre active des services en français soit mise en place par le Conseil de gestion durant l’exercice financier 2013-2014, et ce, à l’égard de tous les ministères, organismes gouvernementaux et entités offrant des services en français au nom du gouvernement.

La planification des ressources humaines occupe aussi une place centrale dans l’offre active de services en français, pour s’assurer que cette offre soit disponible de façon continue.

Il n’est pas acceptable qu’un citoyen se fasse dire en anglais de communiquer avec un centre de services à une heure différente parce que la personne qui occupe le poste désigné commence sa journée de travail plus tard, par exemple.

Et il est tout aussi inexcusable qu’un citoyen ne puisse pas communiquer directement avec un fonctionnaire attritré d’une commission spécialisée, mais doive le faire par personne interposée parce que la personne véritablement qualifiée pour gérer son dossier n’est pas bilingue.

Dans ce contexte, le service offert en français est loin d’être équivalent à celui qui est offert en anglais, et les conséquences découlant de telles pratiques peuvent être très graves.

C’est pourquoi en guise de troisième recommandation, je recommande au ministère des Services gouvernementaux qu’une directive portant sur l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan de ressources humaines pour les services en français soit mise en place par le Conseil de gestion durant l’exercice financier 2013-2014, et ce, à l’égard de tous les ministères, organismes gouvernementaux et entités offrant des services en français au nom du gouvernement. Ce plan devra comprendre des mesures concrètes de désignation, de dotation, de formation et de rétention du personnel.

Je termine ce rapport en exprimant mon souhait que les municipalités membres de l’Association française des municipalités de l’Ontario (AFMO) se dotent d’un règlement ou d’un arrêté municipal officialisant l’emploi du français dans l’exécution de leurs programmes et services.

Il ne s’agit pas d’une recommandation puisque je ne m’adresse pas au gouvernement, mais le sujet n’en est pas moins important pour le développement et l’avenir des communautés francophones de l’Ontario.

Enfin, comme à l’habitude, je consacre un chapitre complet sur nos données statistiques de plaintes reçues et un autre sur les pratiques exemplaires.

Comme vous le savez, j’ai rendu publiques la semaine dernière les réponses du gouvernement aux six recommandations de mon rapport annuel précédent, de même que mes réactions et mon analyse.

J’ai toujours prôné la transparence et aujourd’hui, dans le cadre de notre nouvelle approche, je veux favoriser l’accès des citoyens, des ministères et des organismes gouvernementaux à l’éventail d’outils et de communications que le Commissariat a mis à leur disposition depuis mon entrée en fonction.

C’est pourquoi le Commissariat lance aujourd’hui un tout nouveau site web, accessible sur toutes les plateformes, sur lequel se trouve aussi pour la toute première fois une version interactive de mon rapport annuel.

J’invite tous les citoyens et tous nos collaborateurs à consulter notre nouveau site web et à s’approprier ces ressources, dorénavant classées par secteur de services sous la section « Actualités ».

La francophonie ontarienne est en pleine expansion. Parallèlement, il est nécessaire pour toute organisation de s’adapter à son environnement et de se renouveler périodiquement pour poursuivre l’atteinte de ses objectifs.

Je suis fier que mon bureau se dote d’une nouvelle approche qui permettra, en collaboration avec le gouvernement et les plaignants, d’encore mieux répondre aux besoins des citoyens francophones de l’Ontario.

Je remercie les citoyens qui chaque jour demande leurs services en français auprès des ministères et organismes qui offrent des services publics au nom du gouvernement. Et je dis merci à nos plaignants qui ont pris la peine de se tourner vers le Commissariat pour faire respecter la lettre et l’esprit de Loi sur les services en français.

Je vais maintenant répondre aux questions des journalistes.